Qui sont ces ressortissants de Turquie recrutés par L’EI(IL)? Pourquoi et comment rejoignent-ils L’EI(IL)?

25.09.2014 Vatan
Traduit par: Haldun BAYRI /
Orjinal Metin (tr-22/09/2014)

Nous savons qu’une partie des étrangers combattant dans les rangs de L’EI(IL) en Syrie et en Irak viennent de Turquie. S’y ajoutent ceux qui sont originaires de Turquie mais vivent en Europe, et qui sont partis de là-bas pour passer généralement en Syrie via la Turquie. Plusieurs dossiers ont traité de cette question dans la presse étrangère. Et un nombre considérable d’informations sont disponibles sur ce sujet sur les sites internet et les comptes des médias sociaux en relation directe ou indirecte avec L’EI(IL).
Des chiffres contradictoires sont donnés sur le nombre de ces combattants. En réalité, leur recensement exact est bien sûr impossible. Est-ce d’ailleurs le plus important ? Ce qui doit retenir l’attention, c’est le fait même qu’un nombre non négligeable de personnes partent combattre en Syrie et en Irak depuis la Turquie. Autre point notable : les forces du YPG et du HPG, dans la ligne du PKK, mènent un combat sanglant contre L’EI(IL) en Syrie et en Irak. On a donc des ressortissants de Turquie qui combattent d’un côté dans les rangs de L’EI(IL), et d’autres dans les rangs du YPG et du HPG. C’est-à-dire que la guerre qui est menée en Syrie et en Irak implique des ressortissants de Turquie dans chacun des deux camps.
Qui sont alors ces ressortissants de Turquie recrutés par L’EI(IL) ? Et pourquoi et comment le rejoignent-ils ? Je voudrais souligner quelques points à partir de ce que j’ai noté en consultant des sources ouvertes à tous.

De l’Afghanistan à nos jours
Aux débuts des années 1980, tous ceux qui partaient combattre en Afghanistan étaient des personnes que l’on qualifiait d’« islamistes ». Car il fallait une certaine conscience religieuse et politique pour pouvoir se lancer dans une aventure si longue et difficile. Ensuite une dimension « ethnique » est venue se superposer à cela, avec les djihads de Tchétchénie et de Bosnie, impliquant des jeunes du Caucase et des Balkans partis combattre dans ces contrées.

Ils ne sont pas tous islamistes
Avec le rapprochement des zones de djihad et les facilités grandissantes pour s’engager, le nombre de ces volontaires a augmenté, dans le même temps où l’on assistait à une certaine baisse de qualité de leur conscience politique. Nous apprenons par exemple dans le livre signé par un certain Yahya Konuk, « L’Histoire intime du Djihad, de Bosnie en Afghanistan », qu’il y avait aussi des jeunes ayant un passé de délinquants parmi les volontaires. On fait également état d’anciens toxicomanes dans les articles sur les recrutements de L’EI(IL). Il est donc évident qu’une partie non négligeable des combattants volontaires ne sont pas des gens méritant la qualification d’« islamistes », même s’ils peuvent adopter et intérioriser rapidement les discours néo-salafistes de l’Islam pendant la guerre. 

Les recruteurs, et non pas ceux qui partent
Mais à l’inverse, la plupart de ceux qui convainquent les jeunes de rejoindre les rangs de L’EI(IL), sont des personnes extrêmement bien formées, connaissant bien l’Islam et maîtrisant son interprétation politique. Hier c’était valable pour Al Qaida, et nous pouvons le dire aujourd’hui pour L’EI(IL) : ce sont ces recruteurs qui sont au cœur de ce genre de réseaux. Et il y a bien sûr aussi ceux qui gèrent la logistique et opèrent le transfert sans accroc des éléments convaincus par la cause vers les zones de djihad. Depuis longtemps Al Qaida possédait un réseau de ce genre en Turquie pour le recrutement de volontaires et leur envoi vers les régions de djihad en leur procurant ce dont ils avaient besoin. Depuis la chute de Mossoul, on dit qu’une partie importante de ce réseau est désormais acquise à L’EI(IL).

Il y a de nombreux Kurdes
Nous savons que de nombreux Kurdes d’Irak et de Turquie ont rejoint les rangs de L’EI(IL). L’une des raisons de cette participation vient du fait que la ferveur religieuse chez les Kurdes est supérieure à la moyenne, et une autre raison est que les jeunes Kurdes, surtout en Turquie, sont pauvres, démunis et désespérés. Il y a aussi un aspect politique de cette question : la participation à L’EI(IL) pour ceux qui sont Kurdes mais qui n’ont pas de sympathie pour le PKK, voire qui lui sont hostiles, offre une possibilité de le défier. 

L’attrait de l’« État islamique »
Il y en a encore beaucoup chez nous qui se moquent de cette idée d’« État islamique » créé par L’EI(IL) et de sa déclaration du khalifat, mais il est certain que ces prétentions séduisent aussi certaines personnes. Le plus grand handicap d’Al Qaida était son incapacité à offrir à ses adeptes un objectif palpable et concret. Rejoindre Al Qaida voulait dire faire continuellement la guerre. Mais L’EI(IL) prétend offrir d’autres possibilités que la guerre à ceux qui le rejoignent. Ce qui veut dire que les volontaires ne vont pas en Irak ou en Syrie seulement pour combattre, mais aussi pour vivre sous un État instauré par L’EI(IL). C’est la raison principale des participations de familles entières venant des pays occidentaux.
Un djihad facile ?
C’est très facile de quitter la Turquie ou de passer par elle pour aller combattre dans les rangs de L’EI(IL) en Syrie ou en Irak. Tout d’abord, c’est très proche. Ensuite, L’EI(IL) et les structures semblables paraissent pouvoir s’organiser sur place sans difficulté, y recruter des volontaires et les envoyer vers les zones de combat du djihad. En raison de l’engagement fort d’Ankara pour le renversement du régime d’Assad, il y a aussi une ambiance politiquement favorable aux agissements des djihadistes. Mais du point de vue de la facilité, il faudrait cependant attirer l’attention sur une autre dimension de l’affaire :  si ces personnes faisaient en Turquie un dixième de ce qu’elles font en Syrie ou en Irak, les croyants notamment auraient réagi très sérieusement. Il apparaît donc que le « djihad » semble difficile aujourd’hui en Turquie (du moins à ce stade), mais qu’il peut tout à fait être mené avec facilité –et donc séduire– sur d’autres terres.




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