Le « commandant en chef » Erdoğan contre la Cemaat : rapport d’évaluation des dégâts 9

29.07.2016 ovipot.hypotheses.org
Traduit par: Isabelle Gilles / ovipot.hypotheses.org/14384
Orjinal Metin (tr-18/12/2014)

L’article original a paru dans le quotidien Habertürk le 18 décembre 2014 sous le titre “Hasar tespit raporu-9 Cemaat’e karşı “başkomutan” Erdoğan”.

Répétons-le : au terme de la première année de l’opération anti-corruption du 17 décembre, la Cemaat est dans de sales draps. Elle se fait non seulement expulser de l’appareil d’État mais vit dans la crainte de voir ses établissements les plus lucratifs lui échapper. Depuis que Recep Tayyip Erdoğan a été élu président de la République au premier tour, la guerre contre la Cemaat a acquis priorité de manière patente. Depuis ce moment, la Cemaat essuie des coups aussi répétés qu’efficaces.

Il ne suffit pas de parler de coup d’état
Avant tout, durant les enquêtes des 17 et 25 décembre, les allégations de corruption n’étaient pas sans fondement, mais en fait cette piste a été peu creusée.
Nous avons beaucoup plus entendu parler de ces allégations comme étant les préparatifs du « coup d’état » planifié par la Cemaat.
On a préféré amener sur le tapis qui, comment et pourquoi ces allégations ont surgi plutôt que de discuter le fond de l’affaire. Au final, si les (mauvaises) intentions de la Cemaat ne font plus de doute pour une partie de la populations, les allégations – nullement réfutées – demeurent. À tel point que l’on évoque sérieusement la possibilité que les anciens ministres soient traduits devant la Cour Suprême avec les voix des députés AKP.

La guerre d’Erdoğan
La Cemaat, en prenant pour cible des opérations du 17 et 25 décembre tantôt les ministres, tantôt les amis proches, tantôt les membres de sa famille visait en réalité Erdoğan. C’est-à-dire que, plus que celle de l’AKP, c’est la chute d’Erdoğan qui était recherchée. Ce dernier, en déclarant ouvertement la guerre, en a accepté le principe et assumé le commandement des opérations d’attaque et de défense. En l’espace d’une année, la stratégie à l’encontre de la Cemaat personnellement définie par Erdoğan et mise en œuvre aux différents niveaux du pouvoir ont montré des résultats bien en-deçà des attentes.
Il est évident que le parti au pouvoir, le gouvernement et les médias qu’il contrôle espèrent, parmi tous les changements attendus, avant tout amoindrir la foi en la Cemaat et ses performances.

Anxiété de milieux islamiques
Dans ce contexte, nous observons que face à la Cemaat, ceux – politiciens, journalistes et autres – qui peuvent se rapprocher d’Erdoğan ne proviennent majoritairement pas de mouvements liés à l’islam. Plus que ceux qui ont récemment emboîté le pas au gouvernement, il est important de se demander pourquoi ceux qui hier étaient comme cul et chemise avec la Cemaat sont aujourd’hui en vedette.
En ce qui me concerne, je pense que les personnes de sensibilité islamique, même s’ils n’apprécient pas/haïssent la Cemaat, ne parviennent pas à admettre la situation actuelle qui voit pour la première fois dans l’histoire de la République les deux plus grandes factions islamiques du pays se livrer une guerre sans merci.
La perspective que l’issue de cette guerre – indépendamment du vainqueur et du prix payé par le perdant – à moyen et long terme puisse avoir des conséquences désastreuses pour l’islam politique en Turquie contribue à tempérer certaines personnes dans l’entourage de l’AKP. Étonnamment, cette sensibilité se rencontre peu parmi les cercles de la Cemaat. C’est probablement à mettre au crédit de la force du maillage tissé par Fethullah Gülen durant ses plus de quarante ans d’existence.
Le prix du mépris de la liberté de la presseL’opération du 14 décembre 2014 ressemble à s’y méprendre à celles menées naguère par le trio infernal police/tribunal/médias qui était lié à la Cemaat (Ergenekon, Balyoz, OdaTV…).
Depuis ces opérations fomentées en association avec la Cemaat qui virent plusieurs journalistes se faire emprisonner, l’AKP est sur une pente glissante. Le pouvoir politique se moque bien d’empiéter sur la liberté de la presse ou veut en donner l’impression. Si durant toute sa carrière Erdoğan s’est renforcé en croisant le fer avec la presse, il est ici fortement probable qu’il en aille autrement, car cette fois il s’agit des libertés des journalistes.Il ne suffit pas de parler de coup d’étatAvant tout, durant les enquêtes des 17 et 25 décembre, les allégations de corruption n’étaient pas sans fondement, mais en fait cette piste a été peu creusée.
Nous avons beaucoup plus entendu parler de ces allégations comme étant les préparatifs du « coup d’état » planifié par la Cemaat.
On a préféré amener sur le tapis qui, comment et pourquoi ces allégations ont surgi plutôt que de discuter le fond de l’affaire. Au final, si les (mauvaises) intentions de la Cemaat ne font plus de doute pour une partie de la populations, les allégations – nullement réfutées – demeurent. À tel point que l’on évoque sérieusement la possibilité que les anciens ministres soient traduits devant la Cour Suprême avec les voix des députés AKP.
La guerre d’ErdoğanLa Cemaat, en prenant pour cible des opérations du 17 et 25 décembre tantôt les ministres, tantôt les amis proches, tantôt les membres de sa famille visait en réalité Erdoğan. C’est-à-dire que, plus que celle de l’AKP, c’est la chute d’Erdoğan qui était recherchée. Ce dernier, en déclarant ouvertement la guerre, en a accepté le principe et assumé le commandement des opérations d’attaque et de défense. En l’espace d’une année, la stratégie à l’encontre de la Cemaat personnellement définie par Erdoğan et mise en œuvre aux différents niveaux du pouvoir ont montré des résultats bien en-deçà des attentes.
Il est évident que le parti au pouvoir, le gouvernement et les médias qu’il contrôle espèrent, parmi tous les changements attendus, avant tout amoindrir la foi en la Cemaat et ses performances.
Anxiété de milieux islamiquesDans ce contexte, nous observons que face à la Cemaat, ceux – politiciens, journalistes et autres – qui peuvent se rapprocher d’Erdoğan ne proviennent majoritairement pas de mouvements liés à l’islam. Plus que ceux qui ont récemment emboîté le pas au gouvernement, il est important de se demander pourquoi ceux qui hier étaient comme cul et chemise avec la Cemaat sont aujourd’hui en vedette.
En ce qui me concerne, je pense que les personnes de sensibilité islamique, même s’ils n’apprécient pas/haïssent la Cemaat, ne parviennent pas à admettre la situation actuelle qui voit pour la première fois dans l’histoire de la République les deux plus grandes factions islamiques du pays se livrer une guerre sans merci.
La perspective que l’issue de cette guerre – indépendamment du vainqueur et du prix payé par le perdant – à moyen et long terme puisse avoir des conséquences désastreuses pour l’islam politique en Turquie contribue à tempérer certaines personnes dans l’entourage de l’AKP. Étonnamment, cette sensibilité se rencontre peu parmi les cercles de la Cemaat. C’est probablement à mettre au crédit de la force du maillage tissé par Fethullah Gülen durant ses plus de quarante ans d’existence.

Le prix du mépris de la liberté de la presse
L’opération du 14 décembre 2014 ressemble à s’y méprendre à celles menées naguère par le trio infernal police/tribunal/médias qui était lié à la Cemaat (Ergenekon, Balyoz, OdaTV…).
Depuis ces opérations fomentées en association avec la Cemaat qui virent plusieurs journalistes se faire emprisonner, l’AKP est sur une pente glissante. Le pouvoir politique se moque bien d’empiéter sur la liberté de la presse ou veut en donner l’impression. Si durant toute sa carrière Erdoğan s’est renforcé en croisant le fer avec la presse, il est ici fortement probable qu’il en aille autrement, car cette fois il s’agit des libertés des journalistes.




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