La conférence kurde à Washington : l’unique ordre du jour était la résistance à Kobane

30.09.2014 Vatan
Traduit par: Haldun BAYRI /
Orjinal Metin (tr-28/09/2014)

On ne peut pas dire que le monde s’intéresse vraiment à la résistance de Kobane qui dure en Syrie, mais ceux qui s’y intéressent un peu savent que :
1)  C’est à Kobane que se déroule la première expérience de résistance sérieuse contre les aggressions de l’EI(IL) en Irak et en Syrie.
2)  Les habitants de Kobane ne disposent que d’armes légères pour répliquer aux armes lourdes de l’EI(IL), et ceux qui leur viennent en aide n’ont qu’une puissance de feu elle aussi limitée.
3)  Le YPG, qui défend Kobane, a besoin d’armes lourdes. Mais la coalition internationale, qui a pris la décision d’armer les forces locales contre l’EI(IL) sous le leadership des Etats-Unis, n’a pas encore fait de pas dans ce sens.
4)  La coalition bombarde les positions de l’EI(IL) et du Front Al Nousra en Syrie, mais aucune frappe contre les forces de l’EI(IL) qui encerclent Kobane n’a été réalisée jusqu’au moment où j’écris ces lignes ; et certaines rumeurs selon lesquelles il y’en aurait eu n’ont pas été confirmées.
5)  Encerclé de trois côtés par l’EI(IL), Kobane n’a pas d’autre liaison avec le monde extérieur que par la ville turque de Suruç. Mais Ankara n’ouvre ses portes que pour l’humanitaire, et refuse par exemple les demandes d’autorisation de passage pour un renforcement de la résistance en armes et en combattants.
Vu sous cet angle, la Conférence kurde organisée pour la deuxième fois à Washington par le HDP s’est réunie de façon opportune. Mais vendredi matin, en se rendant au bâtiment du National Press Club, le co-Président du HDP Selahattin Demirtaş semblait bien démoralisé. Il venait de communiquer avec Kobane et avait appris que l’EI(IL) s’était sensiblement rapproché de la ville.
  Demirtaş a d’autre part annoncé qu’il n’avait pas pu obtenir jusqu’à présent de résultats vraiment positifs à la suite de ses contacts à Washington. Autrement dit, la délégation du HDP a quitté la capitale américaine sans espoir de soutien à la résistance de Kobane par des livraisons d’armes lourdes ou par des frappes aériennes. 

Une atmosphère de déprime
Nous pouvons confirmer que la conférence s’est passée dans une atmosphère déprimante en raison de l’inquiétude suscitée par les difficultés rencontrées à Kobane. D’autant que le co-Président du PYD, Salih Müslim, ne pouvant participer à la conférence que par Skype faute d’avoir pu obtenir un visa, a dessiné un tableau dramatique de la situation, tout en faisant un appel d’aide urgente à la communauté internationale.
  Pendant les autres sessions aussi, indépendamment des sujets à l’ordre du jour, le propos est vite revenu sur Kobane. On a surtout souligné la relation directe entre le sort du processus de paix en Turquie avec celui de la résistance de Kobane.
  Car, avec les Kurdes, les spécialistes américains qui participent à la conférence désignent l’attitude d’Ankara comme la raison principale de l’absence de soutien international à Kobane. En vérité, la position ferme et insistante d’Ankara pour ne pas se joindre à la coalition internationale semblait avoir ouvert un boulevard au PKK. Il semblait possible que, d’abord le YPG en Syrie, et ensuite partiellement le HPG en Irak, puissent compter parmi les « forces locales » prêtes à soutenir la lutte contre l’EI(IL). Cette collaboration aurait pu être mise indirectement en œuvre par le biais du Gouvernement Régional Autonome du Kurdistan en Irak.

Erdoğan a changé le cours des événements
Mais tout semble avoir changé lorsque Erdoğan a affirmé à New York que la Turquie était finalement ouverte à contribuer à la coalition, et cela juste dans la semaine où la délégation du HDP amorçait ses rencontres à Washington.
  Du coup, nous sommes désormais face à une situation très compliquée. Tentons simplement quelques constatations :
-  Malgré les divergences d’opinion, le partenariat stratégique entre les États-Unis et la Turquie demeure très précieux pour chacun.
-  De la même façon, les États-Unis et sans doute aussi les autres pays membres à l’OTAN, ne souhaitent pas risquer de perdre les capacités que la Turquie pourrait offrir à la coalition.
-  Mais il est également clair que la coalition internationale ne peut pas abandonner Kobane aux mains de l’EI(IL). Nous pouvons donc penser que l’option de frappes aériennes contre les positions de l’EI(IL) encerclant Kobane reste sur la table, que cela contente Ankara ou non.
-  Cependant, tant que le PKK continue à maintenir des forces armées en Turquie et qu’il garde toujours la lutte armée comme option, il semble difficile qu’Ankara donne son feu vert pour une livraison d’armes lourdes au YPG (voire, dans une certaine mesure, aux Pechmergas d’Irak), en raison de la possibilité d’une utilisation de ces armes par le PKK.
Nous allons continuer demain notre débat sur la Conférence kurde à Washington et sur la situation créée à Kobane.




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